Nouvel album pour le pianiste cubain et le guitariste chanteur américain.

Quelle idée saugrenue : rapprocher Eric Bibb et Omar Sosa ? Certes, leurs univers sont bien distincts mais leurs démarches se ressemblent. L’un comme l’autre cherche à puiser à la source de la mère Afrique avec plus ou moins de distance. Deux disques qui doivent beaucoup aussi à la personnalité de leur producteurs et qui, en outre, se rapprochent par l’esthétique de leur contenant !

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  Eric Bibb : "Spirit I Am"

Eric Bibb "Spirit I Am"
Dixiefrog - fev. 2008 - dist. Harmonia Mundi

Eric Bibb se définit lui-même comme un troubadour et ça lui convient parfaitement. C’est un colporteur d’histoires portant chapeau et arborant l’éternel sourire d’un beau gosse qui croque la vie à pleines dents. En apparence, on est à l’opposé de l’archétype du bluesman tourmenté, déchiré, torturé... Son travail n’en est pas moins convaincant pour autant.

Au cours des dernières années, après un album centre sur des "love songs" et dédié à Curtis Mayfield (A Ship Called Love en 2005), il publiait Praising Peace : A Tribute to Paul Robeson et Diamond Days en 2006, pochette sépia et musique plus typée soul-blues, une très belle réussite...

Toujours sur le label français DixieFrog, voilà que nous arrive Spirit I Am. Ce nouvel album se décline en deux volets.

"Get Onboard", le premier CD est emprunt de spiritualité, avec une nette coloration gospel (Spirit I Am et son superbe arrangement vocal). Le travail de studio met en valeur les qualités du chanteur, l’entraînant parfois sur des chemins plus abruptes, plus électriques comme dans The Promised Land. Les titres offrent néanmoins une diversité qui renforce l’intérêt : les cordes de River Blues, le dialogue vocal de Conversation et un "tube" potentiel - Get Onboard-. Un regard actuel vers les sources de la musique afro-américaine qui reste fidèle à la tradition avec tout le confort moderne qu’offre, en particulier, la présence d’un vrai producteur, musicien qui agit en directeur artistique plus soucieux d’esthétique que de rentabilité : Glen Scott.

"Field Recordings", le second volet est une réappropriation, simple, authentique et très sincère de traditionnels du blues rural du sud des USA, en 7 titres, guitare, voix et un soupçon d’harmonica. Le troubadour se penche sur l’histoire de son peuple avec beaucoup de distinction et de respect comme en témoigne le reportage vidéo qui vient compléter le disque.

Vous l’aurez compris, on ne peut que conseiller l’écoute (et l’acquisition) de ce disque. Une œuvre de gentleman, brillant guitariste et chanteur séduisant, qui prolonge à sa manière les pistes défrichées par Taj Mahal en interprétant la tradition sans donner l’impression de faire du neuf avec du vieux.


> Eric Bibb : "Spirit I Am" - DixieFrog DFGCD 8642 - distribution Harmonia Mundi.

  • Eric Bibb : guitares et voix avec, entre autres : Bonnie Raitt : slide guitare / Ruthie Foster : voix / Grant Dermody : harmonica / Glen Scott : claviers, contrebasse, vocal, percussions et production avec des formations variées.

CD1 : 1. Stayed on freedom / 2.Spirit I Am / 3. The Promised Land / 4.New Beale Street Blues / 5. Get Onboard / 6.If our hearts ain’t In It / 7. Pockets / 8. River blues / 9. Deep in my soul / 10. Conversation / 11. God’s Kingdom / 12. Step by Step

CD2 : 1. No More Cane On The Brazos / 2. Stagolee / 3. Goodnight Irene / 4. Bourgeois Blues / 5. Hold On / 6. Water / 7. I Shall Not Be Moved + séquence vidéo tournée à la Nouvelle Orleans (18 mn)

> Liens :

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  Omar Sosa : "Afreecanos"

Omar Sosa "Afreecanos"
Ota Records - fev. 2008 - dist. Harmonia Mundi

Par le passé, John Coltrane, Archie Shepp, Randy Weston et bien d’autres ont tenté et réussi des rapprochements entre l’Afrique originelle et les musiques afro-américaines. À son tour, le pianiste cubain Omar Sosa cherche à rassembler des éléments dispersés d’une culture commune. Prenant comme épicentre le continent africain, il a cherché les ramifications d’une émigration lointaine dans le temps et l’espace.

En rassemblant des musiciens africains, cubains, brésiliens, français et nord-américains, il cherche à unir des éléments aujourd’hui disparates. Un tâche délicate quand on considère la liste des 21 musiciens conviés et la diversité de leurs conceptions musicales.

Un projet ambitieux et risqué qui n’aurait pu être qu’un assemblage composite sans la présence de Steve Argüelles dans le rôle du producteur qui sait nouer les bonnes ficelles pour donner du sens et de la solidité à l’ensemble. Le batteur anglais, expert en assemblages et recyclage des musiques de toutes couleurs a été à bonne école dans sa longue association en Angleterre avec l’iconoclaste Django Bates (époque Loose Tubes ou Human Chain...). Pour sa seconde collaboration à un album d’Omar Sosa, on sent qu’il a pu prendre la dimension des ambitions du projet pour lui donner corps.

Dès lors, Omar Sosa peut se centrer sur son rôle de leader/catalyseur, essentiellement aux pianos. Il distille une ligne mélodique dense agrémentée de beaux élans lyriques (son solo sur Tumborum en particulier) qui guide le cheminement dans un incroyable brassage des musiques les plus diverses où s’illustrent des vocalistes et solistes souvent très intéressants (parmi eux, les frères Belmondo)

Une œuvre poétique, sensible, paisible et colorée porteuse un message d’unité et de liberté qui, s’il n’est pas neuf, a besoin d’être réaffirmé.


> Omar Sosa : "Afreecanos" - Otá Records OTA1019 - distribution Harmonia Mundi.

Omar Sosa : piano, fender rhodes, vibraphone, marimba, percussions avec, entre autres :
Julio Barreto : batterie / Childo Tomas : basse / Mola Sylla : vocal / Lázaro Galarraga : vocal, bata / Leandro Saint-Hill : flûte et saxophone alto / Stéphane Belmondo : trompette et bugle / Christophe "Disco" Minck : ngoni, kamalengoni, guitare sitar / Orestes Vilató : timbales / Baba Sissoko : percussions / Ali Wague : flûte / Ali Boulo Santo : kora / Stéphane Belmondo : flûte de bambou / Mamani Keita : vocal...

1. Prologo (1:50) / 2. Ollú (4:18) / 3. Nene La Kanou (5:01) / 4. Yeye Moro (5:59) / 5. Babalada (7:43) / 6. Light In The Sky (6:55) / 7. D’Son (5:15) / 8. Tres Negros (4:30) / 9. Mon Yalala (4:03) / 10. Tumborum (5:14) / 11. Why Angá ? (6:45)

> Liens :